Cette affiche exceptionnelle est une bande dessinée de 15 cases. Muette, et par là même universelle, elle conte l’aventure malheureuse d’un homme envoyant au petit matin son chien chercher le journal pour y lire la page des bandes dessinées. Mal lui en prend, les ennuis commencent aussitôt : le chien met le journal en pièces, l’homme se trouve à la porte de sa maison et est bientôt accusé d’attentat à la pudeur… Mais heureusement l’honneur est sauf, puisque tout se résout à la dernière case : l’homme a retrouvé des vêtements et peut enfin lire la page des bandes dessinées, confortablement installé dans une cellule de prison ! Watterson énonce ici, avec l’humour réjouissant et l’expressivité qu’on lui connaît, un principe fondamental : la bande dessinée, au-delà des imprévus et des aléas de la vie, peut se lire à tout moment et n’importe où, et rien au monde ne peut l’empêcher !
Cette séquence, remarquable par sa lisibilité, la densité de sa composition et la beauté de son message, fait référence à la tradition des Sunday pages, les « pages du dimanche » présentes dans la presse américaine depuis la toute fin du XIXe siècle. Lorsqu’il dessinait Calvin et Hobbes, de 1985 à 1995, Bill Watterson a réalisé des dizaines de pages du dimanche, qui se distinguent des strips paraissant les jours de semaine par la présence de la couleur et par un nombre de cases plus important – qui donnent au gag une forme pouvant se rapprocher de celle d’une demi-planche de bande dessinée franco-belge. C’est ainsi à la presse, support capital dans l’histoire mondiale de la bande dessinée, que Watterson a souhaité rendre ici hommage, rappelant que The Yellow Kid, Little Nemo, Krazy Kat ou les Peanuts ont essaimé en noir et blanc et en couleurs dans les pages des journaux avant de devenir des œuvres intemporelles. Et s’il souligne l’importance de la liberté du lecteur, Watterson semble également revendiquer ici celle du créateur de bande dessinée, parfois contraint par les formats de publication et les choix éditoriaux des journaux. On sait d’ailleurs qu’il s’est battu pour que ses travaux soient publiés conformément à ce qu’il souhaitait, et l’affiche de cette 42e édition, créée au terme d’un dialogue continu avec le Festival, révèle sans nul doute l'ambition de Bill Watterson : célébrer avec humour un neuvième art vivant et libre.
En guise de conclusion, nous vous proposons un mot de l’auteur.
Comment est née l’idée de l’affiche et que vouliez-vous exprimer ?
Bill Watterson : Je voulais que l’affiche évoque mon travail mais puisse également incarner toutes les formes de bande dessinée que célèbre le festival. Je suis d’abord passé par diverses idées et approches qui ne fonctionnaient pas, avant de trouver cette idée d’affiche sous forme de bande dessinée sur la lecture de la bande dessinée. J’ai choisi de représenter le monde de la presse quotidienne papier pour me moquer de moi et de l’époque à laquelle j’étais publié. L’affiche cultive d’ailleurs cette idée en intégrant ma bande dessinée dans un quotidien, à la manière des suppléments de la presse du dimanche aux Etats-Unis. Mais ce que je voulais, surtout, c’était une bande dessinée amusante à lire. C’est ce que j’ai toujours essayé de faire dans mon travail personnel.
En temps qu’artiste vous vous intéressez à plusieurs disciplines, dont la peinture. De votre point de vue, qu’est ce qui fonde la singularité de la bande dessinée, en tant que forme d’expression et de création ?
BW : Parce qu’elle conjugue les images et les mots, la bande dessinée se montre d’une versatilité incroyable – elle peut tout exprimer. J’aime sa simplicité, son absence de prétention, sa franchise – soit son habilité à se frayer un chemin dans le désordre pour toucher directement à l’essence des choses. Et plus que tout, j’aime sa beauté. Je pense que l’expressivité de ses dessins tient parfaitement la route face à n’importe quel autre forme d’art.
Vingt ans ont passé depuis la fin de Calvin & Hobbes. Comment voyez-vous ce succès unique en son genre, avec le recul ?
BW : La seule chose que je suis capable de comprendre, c’est ce qui est arrivé sur ma table à dessin. Mon objectif était de réaliser une bande dessinée que je voudrais lire moi-même. J’ai essayé d’écrire honnêtement, et je crois que mon amour pour la bande dessinée transpire dans mon dessin, mais de prime abord le destin de mes bandes dessinées ne m’appartenait plus dès que le pinceau avait quitté le papier. Je suis comblé que des lecteurs aient réagis à mon travail, mais je suis aussi étonné que tout le monde par son succès durable.
http://www.bdangouleme.com/medias/2015/documents/2015_Avant_programme_web.pdfCette séquence, remarquable par sa lisibilité, la densité de sa composition et la beauté de son message, fait référence à la tradition des Sunday pages, les « pages du dimanche » présentes dans la presse américaine depuis la toute fin du XIXe siècle. Lorsqu’il dessinait Calvin et Hobbes, de 1985 à 1995, Bill Watterson a réalisé des dizaines de pages du dimanche, qui se distinguent des strips paraissant les jours de semaine par la présence de la couleur et par un nombre de cases plus important – qui donnent au gag une forme pouvant se rapprocher de celle d’une demi-planche de bande dessinée franco-belge. C’est ainsi à la presse, support capital dans l’histoire mondiale de la bande dessinée, que Watterson a souhaité rendre ici hommage, rappelant que The Yellow Kid, Little Nemo, Krazy Kat ou les Peanuts ont essaimé en noir et blanc et en couleurs dans les pages des journaux avant de devenir des œuvres intemporelles. Et s’il souligne l’importance de la liberté du lecteur, Watterson semble également revendiquer ici celle du créateur de bande dessinée, parfois contraint par les formats de publication et les choix éditoriaux des journaux. On sait d’ailleurs qu’il s’est battu pour que ses travaux soient publiés conformément à ce qu’il souhaitait, et l’affiche de cette 42e édition, créée au terme d’un dialogue continu avec le Festival, révèle sans nul doute l'ambition de Bill Watterson : célébrer avec humour un neuvième art vivant et libre.
En guise de conclusion, nous vous proposons un mot de l’auteur.
Comment est née l’idée de l’affiche et que vouliez-vous exprimer ?
Bill Watterson : Je voulais que l’affiche évoque mon travail mais puisse également incarner toutes les formes de bande dessinée que célèbre le festival. Je suis d’abord passé par diverses idées et approches qui ne fonctionnaient pas, avant de trouver cette idée d’affiche sous forme de bande dessinée sur la lecture de la bande dessinée. J’ai choisi de représenter le monde de la presse quotidienne papier pour me moquer de moi et de l’époque à laquelle j’étais publié. L’affiche cultive d’ailleurs cette idée en intégrant ma bande dessinée dans un quotidien, à la manière des suppléments de la presse du dimanche aux Etats-Unis. Mais ce que je voulais, surtout, c’était une bande dessinée amusante à lire. C’est ce que j’ai toujours essayé de faire dans mon travail personnel.
En temps qu’artiste vous vous intéressez à plusieurs disciplines, dont la peinture. De votre point de vue, qu’est ce qui fonde la singularité de la bande dessinée, en tant que forme d’expression et de création ?
BW : Parce qu’elle conjugue les images et les mots, la bande dessinée se montre d’une versatilité incroyable – elle peut tout exprimer. J’aime sa simplicité, son absence de prétention, sa franchise – soit son habilité à se frayer un chemin dans le désordre pour toucher directement à l’essence des choses. Et plus que tout, j’aime sa beauté. Je pense que l’expressivité de ses dessins tient parfaitement la route face à n’importe quel autre forme d’art.
Vingt ans ont passé depuis la fin de Calvin & Hobbes. Comment voyez-vous ce succès unique en son genre, avec le recul ?
BW : La seule chose que je suis capable de comprendre, c’est ce qui est arrivé sur ma table à dessin. Mon objectif était de réaliser une bande dessinée que je voudrais lire moi-même. J’ai essayé d’écrire honnêtement, et je crois que mon amour pour la bande dessinée transpire dans mon dessin, mais de prime abord le destin de mes bandes dessinées ne m’appartenait plus dès que le pinceau avait quitté le papier. Je suis comblé que des lecteurs aient réagis à mon travail, mais je suis aussi étonné que tout le monde par son succès durable.
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